Du bivouac du Puig Neulos au Coll dels Emigrants

Au petit matin frais du bivouac sous le Puig Neulos, le ciel arbore une palette de gris, laissant peu transparaître l'éclat méditerranéen habituel. Alors que nous dégustons notre dernier petit-déjeuner en plein air et replions minutieusement la tente pour la dernière fois, une mélancolie teintée d’excitation s'empare de nous. Les sommets environnants se dressent fièrement, témoins silencieux de notre ultime journée sur le GR10.

Chacun de nos pas est accompagné d’un flot de pensées et de souvenirs, oscillant entre la nostalgie des moments vécus et la hâte intense de concrétiser cette incroyable aventure humaine. Les cimes qui nous surplombent semblent vouloir nous dire au revoir, tandis que la grande descente vers Banyuls s'amorce progressivement.

Le ciel, incertain et capricieux en ce début de journée, semble peu à peu se laisser gagner par la douceur et la clarté à mesure que nous nous approchons de notre destination finale. Le Puig Neulos, notre dernier campement, s'estompe dans notre sillage, disparaissant dans une étreinte nuageuse, comme pour garder en lui le secret de notre passage.

Ainsi, entre les instants de contemplation et les pas décidés, nous avançons vers le Coll dels Emigrants, conscients que chaque foulée nous rapproche du but ultime et de la fin de notre périple à travers les Pyrénées.

Du Coll dels Emigrants au Puig de sallfort

Guidés par le fil harmonieux des crêtes, nous parvenons finalement à l'ultime belvédère, fièrement perché à 978 mètres au-dessus du niveau de la mer. La scène qui s'offre à nos yeux est d'une beauté époustouflante et offre un panorama saisissant. Au loin, Banyuls se dessine clairement, se détachant sur le paysage côtier. La splendeur du moment capte toute notre attention, et nous réalisons à quel point cette aventure a été riche en paysages spectaculaires. Nous nous attardons, savourant la vue, imprégnant nos mémoires de ces derniers instants magiques en altitude. Le Puig de Sallfort, avec sa présence imposante, se dresse devant nous, marquant l'approche de notre objectif final.

Du Puig de sallfort au coll de Vallauria

La descente en direction du Col de Vallauria se révèle exigeante, avec une pente abrupte et des passages techniques à franchir. Il nous reste désormais près de 9 km pour dévaler l’altitude qui nous sépare de la mer, passant de presque 1000 mètres à son niveau. À mesure que nous avançons prudemment, nos esprits sont inondés de souvenirs de notre tout premier jour de randonnée. Les images déferlent dans nos mémoires, vives et poignantes. Nous prenons pleinement conscience de l'histoire exceptionnelle et singulière que nous venons de vivre, un périple qui restera à jamais gravé dans nos cœurs. Cette descente, bien que périlleuse, se transforme en une marche mémorielle, un hommage à notre propre aventure.

Au col de Formigo

Arrivés à proximité du Col de Formigo, nous nous accordons un dernier pique-nique, un moment doux-amer empreint de mélancolie. Notre moral est en berne, teinté de tristesse et de nostalgie. Il est ardu, après tant d'années de périples et d'aventures, de se résoudre à l'idée que notre voyage touche à sa fin. Nous savourons chaque bouchée, tentant de graver dans nos mémoires les sensations, les goûts et les odeurs, conscients que ces moments simples mais précieux sont les derniers de cette longue traversée. La fin d'une ère, la fin d'une aventure qui nous a transformés à jamais.

Au Col des Gascons

Dès notre franchissement du Col dels Gascons, nous nous retrouvons immédiatement immergés dans un univers typiquement méditerranéen. Le soleil brille de mille feux dans un ciel azur, offrant une chaleur réconfortante après la fraîcheur des sommets. Notre chemin serpente à présent au milieu de vignobles luxuriants, d'amandiers en fleurs et d'oliviers majestueux. Les couleurs vibrantes et les arômes envoûtants de cette région baignée de soleil nous enveloppent, nous rappelant que la mer n'est plus très loin. C'est une marche empreinte de sérénité et de beauté, un véritable festin pour les sens, à mesure que nous nous rapprochons du terme de notre périple.

Dans les faubourgs de Banyuls

Rapidement, nous pénétrons dans les faubourgs de Banyuls, parcourant ses premières ruelles qui, bien qu'elles manquent un peu de charme, n'en demeurent pas moins significatives pour nous. À chaque pas que nous faisons, la foule s'intensifie, nous rappelant que nous quittons l'isolement paisible des montagnes pour retrouver le brouhaha de la vie urbaine. C'est un véritable contraste, presque un choc culturel, et nous ne pouvons nous empêcher de ressentir que nous sortons littéralement d'un autre monde, d'une autre époque peut-être. L'excitation de l'arrivée se mêle à un sentiment de mélancolie tandis que nous réalisons que notre long voyage touche à sa fin.

La mairie de Banyuls devant le mythique panneau du GR10

Nous voilà miraculeusement arrivés à la mairie de Banyuls, nos pieds foulant le sol de cette commune balnéaire, marquant la fin tant attendue de notre périple. Ce moment, suspendu entre deux mondes, représente bien plus qu'une simple fin de randonnée ; c'est la conclusion d'un voyage exceptionnel à travers le temps et l'espace, une odyssée qui nous a vu franchir une chaîne de montagnes entière, de l'Océan Atlantique à la mer Méditerranée.

Il y a des rêves qui semblent inatteignables, qui nous semblent presque impossibles à réaliser. Et pourtant, nous voilà, ayant transformé ce rêve en réalité, ayant parcouru des sentiers escarpés, des forêts majestueuses, des sommets vertigineux, le tout dans la communion des éléments et le partage de moments inoubliables. Qu'y a-t-il de plus beau que de vivre une telle aventure, de créer des souvenirs qui dureront toute une vie.

À Nicolas, mon fidèle compagnon de route et ami dévoué, je dédie ces derniers mots. Ensemble, nous avons pleuré en silence, ri, souffert, découvert et grandi. Cette aventure restera gravée dans nos mémoires comme un témoignage de notre amitié et de notre capacité à relever les défis, quelles que soient les circonstances. Banyuls, avec ses pieds dans l'eau, n'est pas seulement notre ligne d'arrivée ; c'est le sceau final d'une histoire partagée, le chapitre conclusif d'une épopée grandiose qui restera à jamais dans nos cœurs.

Alors que nous regardons la mer, les pieds fermement ancrés sur le sol de Banyuls, nous ressentons une immense gratitude et une profonde satisfaction. L'aventure est terminée, mais les souvenirs, eux, sont éternels. Merci, Nicolas, pour chaque pas, chaque rire, chaque moment. Cette aventure nous appartient, et elle restera à jamais un trésor précieux de notre amitié.